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Production en justice de preuves illicites : deux nouvelles illustrations

En décembre 2023, la Cour de cassation a opéré un revirement important, alignant la position en matière civile tant avec le droit européen qu’avec le droit pénal (Cass., Ass. plénière, 22 déc. 2023, n° 20-20.648).

Jusqu’alors, étaient écartées systématiquement des débats le preuves déloyales (obtenues à l’insu) ou illicites (vidéosurveillance en dehors des conditions légales par exemple).

La Cour de cassation énonce maintenant que le juge doit alors apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits contraires en présence.

Ainsi, le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

Deux nouvelles illustrations :

– Cass. soc. 14 févr. 2024 n° 22-23.073 : exploitation d’images de vidéosurveillance illicites. Un recoupement des opérations enregistrées à la caisse de la salariée (par vidéo/ par journal informatique) avait révélé au total dix-neuf anomalies graves en moins de deux semaines. La Cour de cassation approuve la communication des images vidéo car le visionnage des enregistrements avait été limité dans le temps (du 10 juin au 27 juin), dans un contexte de disparition de stocks, après des premières recherches restées infructueuses et que ce visionnage avait été réalisé par la seule dirigeante de l’entreprise. Elle en déduit que la production de ces images était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et proportionnée au but poursuivi.

– Cass. soc. 17 janv. 2024 no 22-17.474 : un salarié, s’estimant victime d’un tel harcèlement avait produit l’enregistrement clandestin des membres du CHSCT pour justifier l’existence d’un harcèlement moral à son encontre. La Cour de cassation confirme le rejet de cette preuve au motif que sa production n’était pas indispensable au soutien de la demande du salarié, car les autres éléments de preuve qu’il avait produits permettaient déjà de laisser supposer l’existence du harcèlement moral.