En principe, l’employeur ne peut invoquer aucun élément d’ordre privé à l’appui d’une mesure professionnelle.
Dans cette affaire, le salarié, occupant le poste d’auditeur interne, avait accès à de nombreuses informations confidentielles de la société.
Celui-ci avait été licencié pour avoir dissimulé sa situation matrimoniale avec son épouse, ex-salariée en litige avec l’entreprise, ce qui créait selon l’employeur un risque de conflit d’intérêts et un manquement à l’obligation de loyauté. Le salarié demandait la nullité du licenciement pour atteinte à son droit au respect de sa vie privée.
Pour la cour d’appel, l’étude des faits révélait une véritable volonté de dissimulation de son lien matrimonial et donc un risque avéré de conflit d’intérêts. Cette considération prévalait sur le droit à la vie privée invoqué par le salarié.
CA Versailles 30 mai 2024, no 22/00879
Deux arrêts du 26 juin 2024 ont rappelé les règles applicables en cas de départ du salarié en cours d’année :
– Si le contrat de travail stipule une condition de présence à la date prévue de versement du bonus, alors le salarié n’a pas droit à ce versement s’il est absent à la date stipulée,
– Si le contrat de travail ne stipule aucune condition de présence à la date prévue de versement, alors le salarié a droit à sa rémunération variable au prorata de sa présence.
Cass. soc, 26
juin 2024, n° 23-12475 et n° 23-10.634
Depuis un décret entré en vigueur le 7 juillet 2024, les art. R. 1226-10 et s. du C. trav définissent les modalités de la contre-visite médicale effectuée à l’initiative de l’employeur.
En contrepartie de l’obligation pour l’employeur de maintenir tout ou partie de la rémunération du salarié malade, ce dernier peut demander à un médecin de contrôler la réalité de cette incapacité de travail, en organisant une contre-visite médicale, dès le premier jour d’absence (art. L. 1226-1 du Code du travail ; Cass. soc. 13-6-2012 n°11-12.152).
La loi de 2008 avait renvoyé à un décret à paraître le soin de préciser les modalités de cette contre-visite, mais ce texte n’ayant jamais vu le jour, la Cour de cassation s’était alors chargée de définir ces modalités, que ce nouveau décret a largement reprises.
Dès le début de l’arrêt de travail, le salarié doit communiquer à l’employeur :
Le médecin en charge de la contre-visite se prononce sur le caractère justifié de l’arrêt de travail, y compris sa durée.
La contre-visite s’effectue à tout moment de l’arrêt de travail et, au choix du médecin :
-soit au domicile du salarié ou au lieu communiqué par lui, en s’y présentant, sans qu’aucun délai de prévenance ne soit exigé, en dehors des heures de sortie autorisées ou, s’il y a lieu, aux heures communiquées par le salarié en cas de « sortie libre ».
-soit au cabinet du médecin, sur convocation de celui-ci par tout moyen conférant date certaine à la convocation. Si le salarié est dans l’impossibilité de se déplacer, notamment en raison de son état de santé, il en informe le médecin en en précisant les raisons.
A l’issue de sa mission, le médecin informe l’employeur, soit du caractère justifié ou injustifié de l’arrêt de travail, soit de l’impossibilité de procéder au contrôle pour un motif imputable au salarié, tenant notamment à son refus de se présenter à la convocation ou à son absence lors de la visite à domicile.
L’employeur transmet sans délai cette information au salarié.
Un décret du 6 juin 2024 encadre le contenu de l’invitation à négocier le protocole d’accord préélectoral que l’employeur doit adresser aux organisations syndicales intéressées en vue de la mise en place ou du renouvellement du CSE.
Il faut impérativement mentionner :
– le nom et l’adresse de l’employeur, ainsi que, le cas échéant, la désignation de l’établissement,
– l’intitulé et l’identifiant de la convention collective de branche applicable, le cas échéant,
– le lieu, la date et l’heure de la première réunion de négociation du protocole d’accord préélectoral.
C. trav. art. D 2314-1-1 nouveau
Jusqu’à maintenant, la jurisprudence considérait qu’un e-mail contenant « divers reproches à la salariée et invitant le salarié (…) à un changement radical » ou contenant des « mises en garde », constituait un avertissement et que l’employeur ne pouvait à nouveau sanctionner le salarié, ayant épuisé son pouvoir disciplinaire (Cass. soc. 6 mars 2007 n° 05-43.698 ; 26 mai 2010 n° 08-42.893).
Or la Cour de cassation vient de juger qu’un e-mail adressé au cours d’une mise à pied conservatoire demandant au salarié de faire preuve de respect à son égard, de cesser d’être agressif, de colporter des rumeurs et autres dénigrements, ne constituait pas une aucune mesure prise à l’encontre du salarié mais tout au plus un rappel à l’ordre. L’employeur n’avait donc pas épuisé son pouvoir disciplinaire et pouvait sanctionner le salarié sur les mêmes faits. Cass. soc. 20 mars 2024, 22-14.465
Cet arrêt constitue peut-être un revirement mais il convient d’être prudent et se dispenser d’adresser des e-mails de reproche au salarié si l’on envisage une autre sanction qu’un avertissement.
Un arrêté du 3 juin délivre 5 modèles contenant les informations obligatoires à l’embauche :
– Un modèle contient les informations principales à délivrer au salarié dans les 7 jours de l’embauche (annexe 2 de l’arrêté)
– Un modèle contient les informations principales à délivrer au salarié dans les 30 jours de l’embauche (annexe 3 de l’arrêté)
– Un autre modèle regroupe en un document unique les informations des deux modèles ci-dessus (annexe 1 de l’arrêté)
– Deux autres modèles sont consacrés à l’information des salariés envoyés à l’étranger (annexes 4 et 5 de l’arrêté).
En utilisant ces modèles, vous êtes sûr(e) de ne pas passer à côté d’informations à délivrer obligatoirement.
Arrêté du 3 juin 2024, TSST2413775A, JORF n°0140 du 16 juin 2024
Une salariée a été victime d’un malaise cardiaque chez elle à 14h30, ayant entraîné son décès par arrêt à 15h18, alors qu’elle était en télétravail.
L’employeur contestait la prise en charge comme accident du travail par la CPAM, avec les arguments suivants :
– La salarié ne travaillait d’après lui que le matin. Or, le contrat de travail stipulait une fin de journée à 17h30, ce que confirmaient les échanges d’e-mails, qui avaient eu lieu jusqu’à 14h30. Le malaise était donc survenu au temps et au lieu de travail, et ce qui faisait présumer l’accident de travail.
– Il invoquait un état de santé fragile de la salariée (problèmes respiratoires) indépendant du travail. Or, il ne démontrait pas non plus que le décès résulterait d’une cause totalement étrangère au travail.
L’accident était donc présumé de nature professionnelle puisqu’intervenu au temps et au lieu de travail, et aucune cause étrangère n’était démontrée.
CA Nîmes, 2 mai 2024 (RG n° 23/00507)
Un DRH avait caché à son employeur une liaison entretenue depuis près de 6 ans avec une représentante syndicale et du personnel, alors que cette salariée :
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir considéré que le DRH, en dissimulant cette liaison, avait manqué à son obligation de loyauté, cette relation étant de nature à avoir une incidence sur le bon exercice de ses fonctions, même si aucun préjudice réel n’était prouvé. Le licenciement pour faute grave du DRH est donc validé.
C’est une application du principe selon lequel un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail, en l’occurrence la loyauté.
Cass. soc. 29 mai 2024 n° 22-16.218
Pour 𝗿𝗲𝗺𝗲́𝗱𝗶𝗲𝗿 à l’incompatibilité des modalités légales d’acquisition des congés payés avec la jurisprudence de la CJUE (Cass. soc. 13 sept. 2023 n° 22-17.340 et 22-17.638), la loi du 23 avril 2024 prévoit dorénavant les 𝗺𝗼𝗱𝗮𝗹𝗶𝘁𝗲́𝘀 𝘀𝘂𝗶𝘃𝗮𝗻𝘁𝗲𝘀 :
Désormais, tout arrêt maladie ouvre droit à congés payés, quelle qu’en soit l’origine (art. L. 3141-5 C. trav.).
La nouvelle loi prévoit que pour les périodes d’arrêt de travail pour cause d’accident ou de maladie non professionnels, bien qu’assimilées à du travail effectif :
Corrélativement, les règles de calcul de l’indemnité de congés payés sont ajustées : pour le calcul selon la règle « du dixième », les absences pour accident ou maladie non professionnels sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l’horaire de travail de l’établissement, mais cette rémunération est prise en compte dans la limite de 80 % (C. trav. art. L 3141-24, I)
Rien ne change en revanche pour les arrêts de travail résultant d’un accident ou d’une maladie d’origine professionnelle : le salarié acquiert des congés à hauteur de 2,5 jours ouvrables par mois d’absence, soit 30 jours ouvrables en cas d’absence pendant toute la durée de la période de référence.
A l’issue d’une période d’arrêt de travail pour cause de maladie ou d’accident, l’employeur informe le salarié, dans le mois qui suit la reprise du travail, les informations suivantes, par tout moyen (notamment par le bulletin de paie) :
Lorsqu’un salarié est dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident (professionnel ou non), de prendre au cours de la période de prise de congés tout ou partie des congés qu’il a acquis, il bénéficie d’une période de report de 15 mois afin de pouvoir les utiliser.
La loi prévoit des modalités d’application de cette période de 15 mois en fonction de la durée de l’arrêt de travail.
La loi est rétroactive au 1er décembre 2009, ce qui signifie ces nouvelles dispositions sont applicables pour la période courant du 1er décembre 2009 à la date d’entrée en vigueur de la loi.
Enfin, toute action ayant pour objet l’obtention de jours de congés doit être introduite, à peine de forclusion, dans un délai de 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi.
Dans cette affaire, le salarié avait réussi à prouver que l’employeur lui avait annoncé par téléphone son licenciement le jour de l’envoi de la lettre de licenciement.
L’employeur se défendait en soutenant qu’il avait pris soin de prévenir ainsi le salarié dans son intérêt, aux fins de lui éviter de se présenter à une réunion et de se voir congédier devant ses collègues de travail.
La Cour d’appel, puis la Cour de cassation, ont considéré qu’il s’agissait d’un licenciement verbal, automatiquement dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 3 avril 2024, n° 23-10.931).
Si l’employeur avait réussi à démontrer que, ce jour-là, la lettre avait été postée avant l’annonce par téléphone, ce qui aurait modifié le sens de la décision puisque la date du licenciement est fixée à l’envoi de la lettre (Cass. soc., 28 sept. 2022 n° 21-15.606).
De même, lors de l’entretien préalable au licenciement, il convient surtout d’éviter d’annoncer au salarié que la décision est prise de le licencier, mais lui indiquer qu’un licenciement est simplement envisagé.