La victime exploitait un centre équestre. En raison de la faute du praticien, elle n’était plus autonome dans l’exercice de cette activité et avait alors bénéficié de l’aide bénévole de son époux.
La Cour d’appel avait jugé que l’économie liée à l’assistance bénévole de son mari ne constituait pas un préjudice indemnisable.
La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que sans l’aide apportée par son époux, soit elle aurait dû exposer des frais pour bénéficier d’une assistance, soit elle aurait subi une perte de gains professionnels. L’aide bénévole de l’époux constituait donc bien un préjudice indemnisable.
La Cour considère par ailleurs que l’indemnisation de son préjudice ne pouvait être subordonnée à la production de justificatifs des dépenses effectives, le caractère bénévole de l’assistance familiale dont elle avait bénéficié n’étant pas discuté.
Cass. 1ère civ., 22 mai 2019, n° 18-14063
Dans cette affaire, la Cour d’appel avait réparé, au titre de l’incidence professionnelle, la perte de chance pour la victime d’une promotion professionnelle. Son retour à l’emploi était très aléatoire compte tenu des restrictions importantes à une activité, du marché du travail et de son âge.
La Cour de cassation juge qu’il s’agissait effectivement d’un préjudice distinct de celui réparé au titre de la perte de gains professionnels futurs calculée au vu de son ancien salaire et qui n’intégrait pas l’évolution de carrière qu’il aurait pu espérer.
Cass. civ. 2e, 23 mai 2019, n° 18-17.560
La Cour de cassation énonce que lorsque la date de signature de la convention de rupture n’est pas mentionnée sur la convention, celle-ci est alors nécessairement incertaine et il est alors impossible de déterminer le point de départ du délai de rétractation.
La convention est alors nulle et la rupture s’analyse alors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc. 27-3-2019 n° 17-23586
Un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) n’étant pas un établissement de santé, il n’est pas soumis au devoir d’information du patient prévu au paragraphe 7 de l’article L.1111-2 du code de la santé publique. Cependant, il n’échappe pas au devoir d’information résultant de son règlement intérieur et du contrat de séjour souscrit par un résident.
TA Marseille 7 janvier 2019, Mme A. et autres, n°1706444
Le décès du patient, survenu dans la nuit du 14 au 15 novembre 2009, n’a été annoncé à sa famille que le 15 novembre 2009 en début d’après-midi, lorsque son fils, qui s’était rendu sur place pour lui rendre visite, en a été informé par une infirmière, qui lui a également appris que le corps de son père avait déjà été transporté à la morgue.
Le Conseil d’Etat juge que l’épouse du défunt ainsi que ses deux fils avaient nécessairement éprouvé, du fait du manque d’empathie de l’établissement et du caractère tardif de l’annonce, une souffrance morale distincte de leur préjudice d’affection.
CE, 12 mars 2019, n° 417038
Un salarié agissait en nullité de sa convention de forfait jours en se prévalant du fait que l’employeur n’avait assuré aucun suivi de la charge de travail du salarié. Il demandait en conséquence un rappel d’heures supplémentaires.
L’employeur soutenait que le point de départ de la prescription se situait au jour de signature de la convention. La Cour de cassation énonce cependant qu’il suffisait que la demande de rappel d’heures supplémentaires se rapporte à une période non prescrite et qu’il ne fallait donc pas tenir compte de la date de signature de la convention de forfait.
Cass. soc., 27 mars 2019, n° 17-23314
Dans cette affaire, une salariée, dont le contrat de travail ne prévoyait pas de clause de mobilité, avait été licenciée pour avoir refusé de rejoindre son nouveau lieu de travail, à la suite d’une mutation géographique.
La Cour de cassation énonce que, le nouveau lieu de travail étant distant de 80 km du précédent et n’appartenant pas au même bassin d’emploi, le nouvel emploi ne se situait donc pas dans le même secteur géographique et pouvait en conséquence être refusée par la salariée, en l’absence de clause de mobilité. Le licenciement a donc été déclaré abusif.
Cass.soc. 20-2-2019 n° 17-24094
Dans cette affaire, le texte de l’accord collectif stipulait que l’indemnité conventionnelle de licenciement ne pouvait, en fonction de l’ancienneté, être inférieure à la valeur plancher suivante :
– 19 000 euros : si l’ancienneté est comprise entre 3 et 9 ans
– 19 000 euros + 400 euros/année d’ancienneté : si l’ancienneté est comprise entre 10 et 14 ans,
– 19 000 euros + 500 euros/année d’ancienneté : si l’ancienneté est comprise entre 15 et 19 ans,
– 19 000 euros + 600 euros/année d’ancienneté : si l’ancienneté est comprise entre 20 et 24 ans,
– 19 000 euros + 700 euros/année d’ancienneté : si l’ancienneté est comprise entre 25 et 29 ans,
– 19 000 euros + 800 euros/année d’ancienneté : si l’ancienneté est supérieure à 30 ans ;
La Cour de cassation énonce qu’en présence de ce type de texte, l’indemnité conventionnelle doit être calculée par référence à l’ancienneté globale du salarié acquise au jour de la rupture et non par tranches successives.
Cass. soc., 27 mars 2019, n° 17-16689
La Cour de cassation avait été saisie pour avis sur le point de savoir si le barème énoncé par les ordonnances du 22 septembre 2017 (art. L. 1235-3 du Code du travail) était compatible avec l’exigence d’« indemnité adéquate » à titre de réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, énoncée notamment par l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT).
La Cour de cassation a estimé que le terme « adéquat » devait être compris comme réservant aux Etats parties une marge d’appréciation. Elle décrit ensuite le dispositif énoncé par l’article L. 1235-3 du Code du travail et déduit que celui est compatible avec l’article 10 de la convention 158 de l’OIT.
Le Conseil de prud’hommes de Grenoble a rendu quelques jours après l’avis de la Cour de cassation, une décision s’affranchissant de ce barème, allant ainsi à l’encontre de cet avis.
Le prochain épisode sera les deux premières décisions de cours d’appel, attendues le 25 septembre, l’une à Paris, l’autre à Reims.
Au plan international, des recours ont été déposés par des organisations syndicales devant la Cour européenne des droits de l’Homme et de l’OIT, ainsi que devant le comité européen des droits sociaux (CEDS), organe de contrôle de l’application de la charte sociale européenne, qui a d’ailleurs condamné un dispositif de plafonnement des indemnités de licenciement injustifié instauré par la législation finlandaise (CEDS 8-9-2016 n° 106/2014), proche de celui en vigueur en France.
Avis Cass. 17-7-2019 n° 19-70010
La Ligue nationale pour la liberté des vaccinations contestait le passage de trois à onze vaccins obligatoires pour les nourrissons nés après le 1er janvier 2018, décidé par la Ministre de la santé, Madame Agnès BUZYN.
Elle se fondait sur l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, garantissant le droit au respect de la vie privée, dont fait partie le droit à l’intégrité physique.
Le Conseil d’état considère qu’une vaccination obligatoire constitue certes une ingérence dans ce droit, mais qui peut être admise si elle remplit les conditions du paragraphe 2 de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et, notamment, si elle est justifiée par des considérations de santé publique et proportionnée à l’objectif poursuivi.
Il doit ainsi exister un rapport suffisamment favorable entre, d’une part, la contrainte et le risque présentés par la vaccination pour chaque personne vaccinée et, d’autre part, le bénéfice qui en est attendu tant pour cet individu que pour la collectivité dans son entier, compte tenu à la fois de la gravité de la maladie, de son caractère plus ou moins contagieux, de l’efficacité du vaccin et des risques ou effets indésirables qu’il peut présenter.
Le Conseil d’Etat indique que les maladies concernées par les vaccins (notamment diphtérie, poliomyélite, tétanos) sont des infections graves.
Il considère que cette vaccination obligatoire apporte au droit au respect de la vie privée une restriction justifiée par l’objectif poursuivi d’amélioration de la couverture vaccinale pour, en particulier, atteindre le seuil nécessaire à une immunité de groupe au bénéfice de l’ensemble de la population, et proportionnée à ce but.
CE, 6 mai 2019, n° 419242