Actualité droit social

L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire ne prive pas le salarié de contester cette sanction en justice.

Un salarié avait fait l’objet d’une rétrogradation disciplinaire.

La Cour d’appel avait constaté que l’intéressé avait retourné l’avenant signé et précédé de la mention « lu et approuvé » dans lequel figuraient son nouvel emploi avec ses attributions, son lieu de travail, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail. La Cour d’appel en avait déduit que c’était donc en parfaite connaissance de cause qu’il avait signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il avait ainsi acceptée et n’était plus fondé à remettre en cause.

La Cour de cassation casse cet arrêt en énonçant que l’acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail proposée par l’employeur à titre de sanction n’emporte pas renonciation du droit à contester la régularité et le bien-fondé de la sanction.

Cass. soc. 14 avril 2021 n° 19-12.180


Licenciement pour port du voile, en l’absence de clause de neutralité dans le règlement intérieur.

Une salariée, vendeuse dans une enseigne de prêt-à-porter, s’est présentée à son poste de travail avec un foulard dissimulant ses cheveux, ses oreilles et son cou. L’employeur lui a demandé de retirer son foulard. A la suite du refus opposé par la salariée, celle-ci a été licenciée pour cause réelle et sérieuse et a alors saisi le Conseil de prud’hommes.

L’employeur peut prévoir dans le règlement intérieur de l’entreprise ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l’article L. 1321-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients.

Dans cette affaire, aucune clause de ce type n’existait.

La Cour énonce que l’attente alléguée des clients sur l’apparence physique des vendeuses d’un commerce de détail d’habillement ne saurait constituer une exigence professionnelle essentielle et déterminante et en déduit que le licenciement de la salariée était discriminatoire.

Cass. soc., 14 avril 2021, n° 19-24.079


L’accident survenu au temps et au lieu de travail est un accident du travail, peu important que le salarié soit à l’origine de l’altercation.

Est considéré comme un accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu, par le fait ou à l’occasion du travail. En outre, l’accident survenu à un agent, aux temps et lieu du travail, est présumé imputable au service, sauf à la caisse à rapporter la preuve contraire, c’est-à-dire d’une cause totalement étrangère du travail.

Une altercation était intervenue entre le salarié et son supérieur hiérarchique, à la suite de laquelle le salarié avait souffert d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel.

L’arrêt d’appel avait écarté la qualification d’accident du travail en considérant que le salarié avait été exclusivement à l’origine du différend l’ayant opposé à son responsable.

La Cour de cassation casse cependant cet arrêt en énonçant que l’accident était survenu au temps et au lieu du travail, et n’avait donc pas une cause totalement étrangère au travail.

Cass. civ. 2ème, 28 janvier 2021, 19-25.722


Sanction du représentant du personnel pour l’utilisation abusive de ses heures de délégation

Un salarié avait fait l’objet d’un rappel à l’ordre puis d’une mise à pied pour l’utilisation abusive de ses heures de délégations :

– Rappel à l’ordre : des heures de délégation prises sur un mandat avaient été redistribuées différemment par le salarié dix jours plus tard.

– Mise à pied de 3 jours : le salarié avait quitté l’entreprise le 2 octobre 2014, à 15 heures. A son retour, il avait déclaré 5 heures 30 de délégation correspondant à son absence pour cette journée. Il avait par ailleurs adressé à l’employeur un e-mail le même jour en indiquant s’absenter précipitamment en raison de la fuite de son perroquet hors de sa cage. Etait donc établi le motif personnel de l’absence, et donc l’utilisation abusive de ses heures de délégation.

Ces deux sanctions ont été validées par la Cour d’appel puis par la Cour de cassation.

Cass. soc., 13 janv. 2021, n° 19-20781


Vie professionnelle et vie personnelle : exemples de critères pour fixer la frontière

Deux salariés avaient entretenu pendant des mois une relation amoureuse faite de ruptures et de sollicitations réciproques. L’un deux avait finalement été licencié pour faute grave pour avoir notamment fixé une balise GPS sur le véhicule de sa partenaire et lui avoir adressé des messages en interne.

La Cour de cassation invalide cependant le licenciement en considérant que la balise avait été posée sur le véhicule personnel de la salariée, que l’envoi à celle-ci de courriels au moyen de l’outil professionnel était limité à deux messages et que les faits n’avaient eu aucun retentissement au sein de l’agence ou sur la carrière de l’intéressée.

Cass. soc. 16-12-2020 n° 19-14.665


Sont implicitement autorisées par l’employeur les heures supplémentaires comptabilisées dans le logiciel informatique mis à disposition par ce dernier.

Dans cette affaire, le salarié produisait les relevés de pointage des heures supplémentaires effectuées au-delà de 41,5 heures par semaine, telles qu’enregistrées dans le logiciel informatique mis à disposition par l’employeur. La Cour en déduit que l’employeur étant ainsi informé des heures de travail effectuées, il fallait considérer qu’il avait donné son autorisation implicite à la réalisation des heures supplémentaires litigieuses.

Cass. soc. 8 juillet 2020 n° 18-23366


Dommage corporel : actualisation du préjudice

En application du principe de la revalorisation au jour de l’évaluation, il est possible de solliciter une somme supplémentaire devant les juges d’appel à celle sollicitée en 1ère instance.

Cass. 2ème civ., 26 oct. 2017, n° 16-24220


Pour la Cour d’appel de Paris, le bore-out caractérise le harcèlement moral.

Le salarié se plaignait d’un harcèlement moral en invoquant, notamment, les faits suivants :

– Une mise à l’écart par le fait d’avoir été maintenu pendant les dernières années de sa relation de travail sans se voir confier de tâches correspondant réellement à sa qualification et à ses fonctions contractuelles ;
–   Le fait d’avoir été affecté à des travaux mineurs et subalternes relevant de fonctions « d’homme à tout faire » ou de concierge privé au service des dirigeants de l’entreprise.

La Cour d’appel a considéré que ces données caractérisaient des agissements de harcèlement moral.

Cour d’appel de Paris du 2 juin 2020 (n°18/05421)


Peut constituer un dénigrement le fait de critiquer son ancien employeur sur internet.

Les propos tenus par un ancien salarié sur un réseau social, mettant en cause la qualité des services proposés par son ancien employeur, dans le but d’inciter une partie de sa clientèle à s’en détourner, caractérisent des actes de dénigrement engageant sa responsabilité.

TGI Nanterre 21 nov. 2019


La liberté d’expression dans l’entreprise et ses limites

La Cour de cassation rappelle que, sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci de sa liberté d’expression.

Pour caractériser un abus, les courriels litigieux doivent des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Tel n’était pas le cas en effet des e-mail suivants, adressés à des salariés dont il n’était pas le supérieur hiérarchique : « peut-on répondre à son besoin oui ou non ? » , « concernant ma demande je ne vous parle pas d’urgence, je vous demande une réponse dans les meilleurs délais », « le premier bon à tirer qui n’est ni fait ni à faire », « crois-tu que je puisse traiter ce genre de mail ? ».

Tel n’était pas le cas non plus des e-mails suivants, adressés au supérieur hiérarchique : « je ne sais pas comment vous pouvez écrire de telles calembredaines », « vous êtes très mal informé », « soyez plus visionnaire M. G… »

Cass. soc. 15 janvier 2020, n° 18-14177