Actualité droit social

Grève : les actions de blocage des accès aux postes de travail justifient le licenciement d’un salarié protégé.

Les salariés protégés ne peuvent être licenciés qu’avec l’autorisation de l’inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d’un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l’intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l’inspecteur du travail saisi de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement.

Dans le cas de faits survenus à l’occasion d’une grève, l’article L. 2511-1 du code du travail dispose que « l’exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ».

En l’espèce, le salarié avait, à plusieurs reprises, bloqué physiquement l’accès à une cabine de commande de délovage de câble, empêchant ainsi d’autres salariés de travailler. Il avait également bloqué l’accès à un navire, en occupant l’échelle de coupée, empêchant ainsi les salariés de travailler. Il en est résulté une atteinte à la liberté de travail des autres salariés, faits d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement du salarié protégé.

CE 27 mai 2021 n° 433078


Résiliation judiciaire du contrat de travail : pas de prescription des faits

La Cour de cassation énonce que le juge, saisi d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, doit examiner l’ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté.

L’arrêt d’appel avait notamment considéré que la demande présentée au titre du manquement à l’obligation de sécurité était relative à l’exécution du contrat de travail et se prescrivait donc par deux ans. Cet arrêt a donc été censuré par la Cour de cassation.

Cass. soc., 30 juin 2021, n° 19-18.533


Est illicite la mise en place d’une caméra destinée à surveiller le seul salarié d’une cuisine.

Aux termes de l’article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

L’employeur avait notifié au salarié un avertissement en ces termes : « Ne constatant, malgré nos précédents et nombreux rappels à l’ordre verbaux, aucun changement dans votre comportement, nous nous voyons dans l’obligation, par cette lettre, de vous adresser un avertissement. Parallèlement, nous vous informons de notre intention de mettre en place, dans les prochains jours, un système de vidéo-surveillance et un registre de contrôle et pointage de vos heures de travail. Nous espérons vivement que ces démarches engendreront des changements dans votre comportement au travail ».

Le salarié avait par la suite été licencié sur le fondement d’actes enregistrés par la caméra.

L’employeur soutenait que le dispositif de vidéo-surveillance était destiné à empêcher le salarié de réitérer ses manquements.

La Cour de cassation énonce cependant que le salarié, qui exerçait seul son activité en cuisine, était soumis à la surveillance constante de la caméra qui y était installée. Elle en a déduit que les enregistrements issus de ce dispositif de surveillance, attentatoire à la vie personnelle du salarié et disproportionné au but allégué par l’employeur de sécurité des personnes et des biens, n’étaient pas opposables au salarié. Le licenciement a donc été invalidé.

Cass. soc. 23 juin 2021 n° 19-13856


Réintégration du salarié protégé : droit aux salaires depuis la date du licenciement.

Aux termes l’article L. 2411-10 du code du travail, lorsque le salarié protégé licencié sans autorisation administrative de licenciement demande sa réintégration pendant la période de protection, il a droit, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu’à sa réintégration.

Dans cette affaire, une salariée protégée avait été licenciée et avait perçu une indemnité de préavis.

Son licenciement ayant été déclaré nul, celle-ci demandait la perception de ses salaires depuis son licenciement, sans déduction de l’indemnité de préavis versée.

La Cour d’appel puis la Cour de cassation lui ont donné raison : le point de départ de l’indemnité due au titre de la violation du statut protecteur devait être fixé à cette date.

La Cour précise que l’employeur n’avait formé aucune demande de restitution de l’indemnité compensatrice de préavis, sous-entendant ainsi que cela aurait probablement été possible.

Cass. soc. 9 juin 2021, n° 19-15.593


Prescription des faits fautifs : la connaissance des faits par un supérieur hiérarchique n’ayant pas de pouvoir disciplinaire peut marquer le point de départ du délai.

La Cour d’appel avait considéré que le point de départ du délai de prescription était la date à laquelle un formateur, qui ne disposait d’aucun pouvoir disciplinaire à l’égard du salarié, avait transmis son rapport sur ces événements à la direction de la société.

La Cour de cassation censure cet arrêt en considérant qu’il fallait rechercher si le formateur avait la qualité de supérieur hiérarchique. Si c’est le cas, c’est alors la date à laquelle ce supérieur a connaissance des faits fautifs qui marque le point de départ de la prescription.

Cass. soc., 23 juin 2021, n° 20-13.762 et n° 19-24.020


Requalification de CDD successifs en CDI : le montant du rappel de salaire des périodes interstitielles dépend du temps du CDD précédent.

En cas de requalification de contrats à durée déterminée successifs en CDI, se pose la question des sommes demandes au titre des périodes interstitielles, c’est-à-dire des périodes entre chaque CDD.

Pour limiter à une certaine somme le montant du rappel de salaire dû au titre de ces périodes interstitielles, l’arrêt d’appel, après avoir retenu que le salarié, qui s’était tenu à la disposition de l’employeur, était bien fondé en sa demande de rappel de salaire, avait ajouté qu’en revanche l’intéressé ne pouvait prétendre à un rappel de salaire sur la base d’un temps complet dans la mesure où il résultait des bulletins de paie qu’il avait toujours travaillé à temps partiel pour une durée ne dépassant pas 100 heures par mois.

La Cour de cassation infirme l’arrêt : en jugeant qu’en retenant pour base de calcul du montant du rappel de salaire dû la durée moyenne mensuelle de travail obtenue par l’addition des durées des contrats à durée déterminée exécutés rapportée au mois, et non la réalité de la situation de chaque période interstitielle telle que résultant de chacun des contrats à durée déterminée l’ayant précédée, la cour d’appel avait violé les textes susvisés.

Cass. soc. 2 juin 2021 n° 19-16183


Clause de non-concurrence : la salariée embauchée par une société concurrente perd définitivement le bénéficie de la contrepartie financière, même si sa période d’essai est rompue par le nouvel employeur.

Une salariée ayant signé une clause de non-concurrence est entrée le lendemain au service d’une société concurrente, qui a rompu la période d’essai au bout de 3 mois.

La salariée avait alors demandé à son ancien employeur le versement de la contrepartie financière pour la période postérieure à la rupture de la période d’essai.

La Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel ayant jugé que la salariée, en se mettant au service d’une société concurrente, perdait définitivement le bénéfice de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence.

Cass. soc. 5 mai 2021 n° 20-10.092


Pass sanitaire et obligation de vaccination pour les salariés : une foire aux questions publiée par le ministère du travail

Le ministère du travail a publié le 9 août 2021 sur son site un Questions-réponses nommé « Obligation de vaccination ou de détenir un pass sanitaire pour certaines professions ».

Pour rappel, le pass sanitaire sera exigé :

– À partir du 30 août 2021 : pour les salariés travaillant dans les lieux de loisirs et de culture rassemblant plus de 50 personnes (salles de spectacle, parcs d’attractions, salles de concert, festivals, salles de sport, cinémas…). Ou pour les salariés travaillant dans des cafés, restaurants, centres commerciaux, hôpitaux, maisons de retraite, établissements médico-sociaux, ainsi que pour les voyages en avion, train.

– À partir du 15 septembre 2021 : la vaccination contre le Covid-19 devient obligatoire pour l’ensemble des professionnels qui sont en contact avec des personnes fragiles à protéger à savoir « les personnels soignants et non soignants des hôpitaux, des cliniques, des maisons de retraite, des établissements pour personnes en situation de handicap, pour tous les professionnels ou bénévoles au contact des personnes âgées ou fragiles, y compris à domicile ».


Le principe d’égalité de traitement ne peut être invoqué pour revendiquer la conclusion d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés.

Aux termes de l’article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

Il en résulte qu’un salarié ne peut invoquer le principe d’égalité de traitement pour revendiquer les droits et avantages d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés pour terminer une contestation ou prévenir une contestation à naître.

La Cour de cassation casse un arrêt d’appel qui avait octroyé au salarié une indemnité sur le fondement de l’égalité de traitement au motif que l’employeur avec conclu avec d’autres salariés une transaction et pas avec le demandeur, alors que celui-ci avait un profil équivalent.

Cass. soc. 12 mai 2021 n° 20-10.796


L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire ne prive pas le salarié de contester cette sanction en justice.

Un salarié avait fait l’objet d’une rétrogradation disciplinaire.

La Cour d’appel avait constaté que l’intéressé avait retourné l’avenant signé et précédé de la mention « lu et approuvé » dans lequel figuraient son nouvel emploi avec ses attributions, son lieu de travail, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail. La Cour d’appel en avait déduit que c’était donc en parfaite connaissance de cause qu’il avait signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il avait ainsi acceptée et n’était plus fondé à remettre en cause.

La Cour de cassation casse cet arrêt en énonçant que l’acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail proposée par l’employeur à titre de sanction n’emporte pas renonciation du droit à contester la régularité et le bien-fondé de la sanction.

Cass. soc. 14 avril 2021 n° 19-12.180