Actualité droit social

La prime d’ancienneté doit être versée même en cas d’absence du salarié.

L’accord d’entreprise invoqué précisait que « le montant de la prime est déterminé en adéquation avec la durée du travail et supporte de ce fait les majorations pour heures supplémentaires ». L’employeur en déduisait que la prime d’ancienneté ne devait pas être versée en cas d’absence du salarié.

La Cour de cassation énonce cependant que si l’accord d’entreprise prévoit que le montant de la prime d’ancienneté est déterminé en adéquation avec la durée du travail et supporte de ce fait les majorations pour heures supplémentaires, il ne résulte pas de ces dispositions que la prime d’ancienneté puisse être réduite voire supprimée en cas d’absence du salarié.

Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 20-10.107


Système de vidéo-surveillance : pas besoin d’information préalable des salariés lorsque celui-ci est seulement destiné à sécuriser une zone et non surveiller l’activité des salariés.

En application de l’article L. 1222-4 du code du travail, si l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail, il ne peut être autorisé à utiliser comme mode de preuve les enregistrements d’un système de vidéo-surveillance permettant le contrôle de leur activité, dont les salariés n’ont pas été préalablement informés de l’existence.

Un système de vidéo-surveillance avait été mis en place dans le but de sécuriser une zone de stockage de l’entreprise non ouverte au public ainsi que le couloir y donnant accès, et permettait de visualiser les portes des toilettes. Ce système avait révélé qu’un salarié s’était livré à des pratiques de voyeurisme dans les toilettes pour femmes. Celui-ci avait en conséquence été licencié pour faute grave.

La Cour d’appel avait considéré que, même si le dispositif n’avait pas été installé dans le but de contrôler les salariés mais uniquement pour sécuriser une zone de stockage, l’employeur aurait dû informer les salariés de son existence.

La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que seuls les dispositifs de contrôle de l’activité des salariés doivent donner lieu à une information préalable des salariés.

L’employeur était donc fondé à utiliser les vidéos ainsi réalisées comme moyen de preuve des faits fondant le licenciement.

Cass. soc. 22 sept. 2021 n° 20-10.843


L’employeur manque à son obligation de reclassement en cas de proposition d’un poste non conforme à la convention collective.

Dans cette affaire, les horaires du seul poste proposé dans le cadre de l’obligation de reclassement n’étaient pas conformes aux stipulations de la convention collective.

La Cour de cassation en déduit que l’employeur ayant manqué à son obligation de reclassement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 20-14.322


Pas de modification de la rémunération sur la base d’un accord collectif sans l’accord du salarié.

Il résultait du contrat de travail et des bulletins de paie du salarié avant l’application de l’accord collectif que la rémunération brute mensuelle du salarié était fixée de façon forfaitaire, hors toutes primes ou indemnités.

A compter de la transposition de cet accord, cette rémunération avait été scindée en un salaire de base dont le taux était diminué pour y intégrer une prime d’ancienneté.

La Cour de cassation comme la cour d’appel ont jugé que l’accord du salarié était requis, le mode de rémunération contractuelle de l’intéressé ayant été modifié dans sa structure.

Cass. soc. 15 sept. 2021 n° 19-15732


Résiliation judiciaire : l’indemnité spéciale est due en cas d’inaptitude consécutive à un accident du travail.

Dans cette affaire, le salarié avait d’abord saisi le Conseil de Prud’hommes le 14 mars 2014 d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Ensuite, victime d’un accident du travail le 27 avril 2014, il a été déclaré inapte à l’issue de deux examens médicaux, puis licencié pour inaptitude le 24 octobre suivant.

L’employeur avait ensuite été condamné à verser au salarié une somme au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement de l’article L. 1226-14 du code du travail (double de l’indemnité légale de licenciement).

La Cour de cassation approuve cette décision en considérant qu’ayant constaté que le salarié avait fait l’objet d’un licenciement en raison d’une inaptitude consécutive à un accident du travail, la cour d’appel, qui a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et dit qu’elle produisait les effets d’un licenciement nul, a décidé à bon droit que l’employeur était redevable de l’indemnité spéciale de licenciement prévue par l’article L. 1226-14 du code du travail.

Cass. soc. 15 sept. 2021 n° 19-24.498


Non-respect de la procédure conventionnelle de licenciement : impact sur la validité du licenciement seulement si le salarié n’a pu utilement assurer sa défense.

L’article 13 de la convention collective nationale du Crédit agricole institue la saisine obligatoire d’un conseil de discipline.

En l’espèce, le conseil de discipline avait été saisi mais la convocation du salarié devant celui-ci ne comportait en pièce jointe que le rapport de synthèse établi par la direction de l’établissement bancaire à l’encontre du salarié, alors que le dossier disciplinaire comportait également les éléments d’enquête interne constitués par le rapport d’audit de contrôle périodique et ses annexes, à savoir notamment la liste détaillée des opérations de ristournes analysées.

La Cour d’appel avait considéré que licenciement intervenu ultérieurement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse, en raison du fait que le dossier transmis au salarié n’était pas complet.

La Cour d’appel casse cet arrêt en considérant que la Cour d’appel aurait dû rechercher si l’irrégularité constatée avait privé le salarié de la possibilité d’assurer utilement sa défense devant le conseil de discipline.

Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 19-15.039


Licenciements collectifs dans la branche Syntec : pas d’obligation de saisir la commission paritaire de l’emploi

Cet arrêt est relatif aux articles 3 et 4 de l’accord du 30 octobre 2008 relatif à la commission paritaire nationale de l’emploi, annexé à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (syntec).

Selon le premier de ces textes, d’une part, lorsqu’un projet de licenciement collectif d’ordre économique porte sur plus de dix salariés appartenant à un même établissement occupant plus de cent salariés, la commission paritaire nationale de l’emploi est informée par la direction de l’entreprise intéressée, le lendemain de la première réunion du comité d’établissement. D’autre part, les organisations syndicales de salariés ou d’employeurs contractantes de l’accord disposent alors d’un délai de six jours à compter de cette date pour saisir la commission paritaire de l’emploi qui disposera alors de quatorze jours pour se réunir et examiner le projet présenté par l’entreprise aux représentants du personnel.

L’une des missions de cette commission consiste à étudier les projets de licenciements collectifs d’ordre économique qui lui sont soumis et les possibilités de reclassement des salariés licenciés pour motif économique.

La Cour d’appel avait considéré que la saisie de cette commission était obligatoire et qu’en l’absence de saisine de cette commission, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l’obligation de reclassement.

La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que certes, l’employeur est tenu d’informer la commission paritaire nationale de l’emploi du projet de licenciement économique collectif, mais seule la saisine de ladite commission par les organisations syndicales de salariés ou d’employeurs contractantes de l’accord du 30 octobre 2008 la conduit à exercer la mission qui lui est attribuée en matière de reclassement.

Il en résulte que la saisine de cette commission n’est pas obligatoire.

Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 19-18959


La faute inexcusable est de droit si la victime de l’accident avait informé l’employeur du risque qui s’est ensuite réalisé.

Aux termes de L. 4131-4 du code du travail, le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au CHSCT avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé.

Dans cette affaire, le salarié avait été subi une agression sur son lieu de travail, prise en charge au titre des accidents du travail. Préalablement, celui-ci avait transmis à son employeur une lettre de menaces (« dégage ou on te crève ») reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l’entreprise, de sorte qu’il fallait considérer qu’il avait signalé à celui-ci le risque d’agression auquel il était exposé.

Cass. 2e civ. 8 juillet 2021, n° 19-25.550


Mise à la retraite : si l’employeur omet d’interroger le salarié dans les 3 mois avant ses 70 ans, la rupture est requalifiée en licenciement nul.

Lorsque l’employeur ne respecte pas le délai de 3 mois avant l’anniversaire du salarié pour l’interroger sur son intention de partir à la retraite avant l’âge de 70 ans, il ne peut pas user de la possibilité de mise à la retraite pendant l’année suivant la date de cet anniversaire.

La mise à la retraite ainsi intervenue de manière irrégulière produit alors les effets d’un licenciement nul, car fondé uniquement sur l’âge du salarié et donc discriminatoire.

CA Paris 19-5-2021 n° 18/11533


Les divers délais de prescription en droit du travail selon la nature de la demande

Par plusieurs arrêts du 30 juin 2021, la Cour de cassation a fixé les délais de prescription suivants :

– Rappel d’heures supplémentaires en raison de l’invalidité d’une convention de forfait jours : délai de prescription de 3 ans (créance salariale) et non celui de 2 ans applicable en matière d’exécution du contrat (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 18-23.932)
– Rappel de salaire fondée sur la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet : délai de prescription de 3 ans (créance salariale) (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-10.161)
– Demande de versement de la gratification afférente à la médaille du travail : discrimination en raison de l’âge, donc application du délai de prescription de 5 ans (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-14.543)
– Atteinte au principe d’égalité de traitement : délai de prescription de 3 ans (alors que la discrimination est soumise au délai de 5 ans) (Cass. soc., 30 juin 2021 n° 20-12.960)
– Action en requalification d’un contrat de mission, à l’égard de l’entreprise utilisatrice, en contrat à durée indéterminée, fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat. Délai de prescription de 2 ans (exécution du contrat). Point de départ du délai de prescription : le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-16.655)