Actualité droit social

Attention, la rupture conventionnelle est interdite dans certains cas !

Une rupture conventionnelle homologuée ne peut être conclue dans les cas suivants :

– En présence d’un CDD ou d’un contrat d’apprentissage (seule une rupture amiable est alors possible)

– En présence d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ou d’un accord de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC). Seule la rupture amiable collective est admise dans ces cas.

– Lorsque la santé mentale du salarié est altérée, son consentement étant alors vicié. Il en est de même en cas de harcèlement moral ou sexuel caractérisé ou en présence de manœuvres ou de pressions de l’employeur.

En revanche, contrairement aux idées reçues, elle peut être conclue :

– En cas d’arrêt pour maladie non professionnelle, et même en cas d’arrêt pour maladie professionnelle ou accident du travail

– En cas de congé de maternité et pendant la période de protection suivant la fin du congé

– En cas de congé parental d’éducation

– En cas de congé sabbatique ou sans solde

– En présence de difficultés économiques, sous réserve que cela ne revienne pas à contourner les garanties prévues pour le salarié en matière de licenciement économique.


Relation amoureuse au travail : les grands principes

Le fait d’entretenir une relation amoureuse avec un collègue, voire même d’avoir des relations sexuelles au bureau, relève de la vie personnelle du salarié et ne peut en principe être sanctionné (Cass. ch. soc., 21 décembre 2006, n° 05-41140).

En revanche, de tels faits peuvent engendrer un licenciement s’ils causent un trouble caractérisé dans l’entreprise : par exemple si la relation sexuelle a lieu en public ou si celle-ci est surprise par d’autres salariés, entraînant un scandale dans l’entreprise et nuisant ainsi à son bon fonctionnement.

Si cette relation a lieu dans le cadre de faits de harcèlement sexuel et/ou que celle-ci n’est pas consentie, l’auteur des faits doit être sanctionné et poursuivi pénalement.


Est nul le licenciement fondé sur un usage non abusif par le salarié de sa liberté d’expression, même en présence d’autres griefs.

Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l’exercice, par le salarié, de sa liberté d’expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.

Le directeur général de filiale roumaine du groupe avait été licencié avait été licencié pour faute grave, notamment pour avoir usé abusivement de sa liberté d’expression.

Lui étaient reprochés dans la lettre de licenciement les propos qu’il avait tenus dans un courrier adressé au président du directoire du groupe dans lequel il mettait en cause le directeur d’une filiale ainsi que les choix stratégiques du groupe.

Cette lettre du 23 décembre 2016 adressée par le salarié au président du directoire du groupe, pour dénoncer la gestion désastreuse de la filiale roumaine tant sur le terrain économique et financier qu’en termes d’infractions graves et renouvelées à la législation sur le droit du travail, faisait suite à l’absence de réaction de sa hiérarchie qu’il avait alertée le 2 décembre 2016 sur ces problèmes majeurs de sécurité et de corruption imputables à la gestion antérieure.

La Cour d’appel avait considéré que les termes employés n’étaient ni injurieux, ni excessifs, ni diffamatoires à l’endroit de l’employeur et du supérieur hiérarchique.

La Cour de cassation approuve donc la cour d’appel d’en avoir déduit que l’exercice de sa liberté d’expression par le salarié n’était pas abusif et que le licenciement était donc nul.

Cass. soc. 29 juin 2022 n° 20-16.060


Charge de travail : l’employeur doit justifier avoir pris les mesures de nature à garantir que celle-ci reste raisonnable.

L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

Pour satisfaire à son obligation de sécurité, l’employeur doit justifier avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et assuraient une bonne répartition dans le temps du travail et donc à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

Cass. soc., 2 mars 2022, n° 20-16683


Temps partiel : ne pas confondre heures complémentaires et heures supplémentaires

En matière de temps partiel, on parle d’heures complémentaires et non d’heures supplémentaires et leur régime est encadré beaucoup plus strictement !

Le nombre d’heures complémentaires qu’il est possible de faire effectuer doit être prévu au contrat. Ce nombre ne peut pas dépasser 1/10e de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue, voire 1/3 si une convention ou accord collectif de branche étendu le prévoit. En cas de dépassement de ces plafonds, le salarié peut demander des dommages-intérêts (en plus du paiement des heures).

Les heures complémentaires ne doivent pas avoir pour effet de porter la durée du travail au niveau de la durée légale (35 heures) ou conventionnelle du travail. En cas d’atteinte de la durée légale, même sur 1 mois, le salarié peut demander la requalification en temps plein de son contrat (Cass. soc. 21 sept. 2022 n° 20-10.701).

Chaque heure complémentaire accomplie donne lieu à une majoration de salaire égale à :
– 10 % pour celles n’excédant pas 1/10e de la durée contractuelle de travail ;
– 25 % pour celles excédant cette limite.

Le salarié doit être informé au moins 3 jours à l’avance des heures complémentaires à effectuer. À défaut, il peut refuser de les faire.

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Un salarié me menace d’agir en justice, puis-je le licencier ?

Principe : le licenciement d’un salarié en raison d’une action en justice introduite ou susceptible d’être introduite par ce dernier à l’encontre de son employeur est sans cause réelle et sérieuse, voir nul car intervenu en violation de la liberté fondamentale d’agir en justice.

Limite : la Cour de cassation vient de juger qu’était justifié le licenciement d’un salarié pour avoir menacé son employeur de déposer plainte auprès des services de police.

En effet, cette menace constituait une nouvelle illustration, dans un contexte global de menaces à l’encontre de ses collègues et supérieurs, de la logique d’intimidation dont le salarié avait déjà fait preuve par le passé. La Cour considère donc que le salarié avait abusé de son droit d’agir en justice.

Cass. soc., 7 déc. 2022, 21-19.280

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Permis de conduire suspendu : licenciement possible ?

Suspension ou retrait du permis de conduire lorsque le salarié conduit pendant son temps de travail : l’employeur peut le cas échéant licencier le salarié pour faute, voire faute grave, selon l’infraction commise. Par exemple en cas de conduite en état d’ivresse ou sous l’emprise de stupéfiants.

Suspension ou retrait du permis de conduire lorsque le salarié conduit en dehors de son temps de travail :
– L’infraction au code de la route ne peut être considérée comme une faute professionnelle.
– En revanche, si l’utilisation du véhicule est nécessaire à l’exécution de la mission du salarié, l’employeur pourra le licencier pour motif personnel non disciplinaire, en raison du trouble objectif causé au bon fonctionnement de l’entreprise.

Dans tous les cas, il faut consulter la convention collective, car dans certains secteurs des textes imposent de rechercher à reclasser le salarié avant d’envisager son licenciement.

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Le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation.

La Cour d’appel avait débouté le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour violation de la durée maximale du travail : après avoir constaté que le salarié avait travaillé 50,45 heures durant une semaine, celle-ci avait cependant retenu que celui-ci aurait dû démontrer très exactement en quoi ces horaires chargés lui auraient porté préjudice et, qu’en l’état des éléments soumis, ce préjudice n’était pas suffisamment démontré.

La Cour de cassation censure cet arrêt en énonçant que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation.

Cass. soc., 26 janvier 2022, 20-21.636


Concours entre les stipulations contractuelles et les dispositions conventionnelles

En cas de concours entre les stipulations contractuelles et les dispositions conventionnelles, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d’entre eux pouvant seul être accordé.

Pour débouter l’employeur de sa demande de remboursement de la prime d’assiduité, l’arrêt d’appel avait retenu que :
– la prime de production, qui est une prime forfaitaire journalière basée sur la présence du salarié à son poste de travail, concernant tous les salariés ayant plus d’un an d’ancienneté et dont le montant dépend du niveau et de l’échelon ainsi que de la gratification annuelle, pouvant varier en fonction de la valeur du salarié, appréciée par le responsable d’exploitation selon certains critères,
– n’avait pas le même objet que la prime d’assiduité versée par l’employeur, fondée sur la présence du salarié à son poste.

La Cour de cassation censure cependant la Cour d’appel, dans la mesure où cette dernière n’avait pas suffisamment caractérisé que les primes de production et d’assiduité n’avaient pas le même objet.

Cass. soc., 11 mai 2022, n° 21-11.240


Heures supplémentaires : est considéré comme suffisamment précis la production par le salarié d’un simple décompte des heures effectuées, l’employeur devant alors répondre en produisant des éléments sur les heures réalisées.

L’article L. 3171-4 dispose qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Pour la Cour de cassation, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande de paiement d’heures supplémentaires, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Dans ces affaires, la Cour avait considéré comme suffisamment précis la production par le salarié d’un simple décompte des heures effectuées, l’employeur devant alors fournir des éléments de nature à justifier les horaires du salarié.

Cass. soc., 11 mai 2022, n° 20-17763 ; Cass. soc., 13 avril 2022, 20-17.896